Récit
Les Enfers virtuels sont une invention de certaines sociétés puritaines
de la Galaxie. Dans ces géhennes virtuelles souffrent sans fin les
avatars de ceux qui ont transgressé les règles de ces civilisations.
Les tenants et les opposants de ces Enfers se livrent des guerres sans
merci. Jusque là dans le Virtuel. Sans morts ni blessés physiques. Mais
cette guerre menace de se déplacer dans le Réel. Car les opposants aux
Enfers sont prêts à faire monter les enchères. Et la Culture n’aime pas ça
du tout.
Quel rôle joue Veppers, l’homme le plus puissant et le plus corrompu de son système stellaire, dans ce conflit ?
Et quel pourrait être le destin de Ledjedje qu’il a tuée, mais qui a été ramenée à la vie par un vaisseau de la Culture ?
La vendetta de Lededje pourrait avoir sa place dans les projets de Circonstances Spéciales.
Interlude
Les enfers virtuel est le second roman du cycle de la Culture dont je fais la critique dans ce blog - les précédents ayant été lus antérieurement à la tenue de ce blog.
Particularité de cette saga, c'est que chacun des tomes sont à la fois indépendant et traitant d'un pan différent de l'univers de la Culture. Même si la lecture "dans l'ordre", permet d'être plus familiarisé des protagonistes présents et des particularités de la civilisation culturienne, ce n'est clairement pas une exigence.
Vous perdrez tout au plus quelques spécificités - par exemple, le "running gag" sur les noms des vaisseaux de la Culture, où par réaction au fait qu'une civilisation trouvait que les noms attribués aux vaisseaux de la Culture manquait de sérieux, de « gravité », il est usuel de rencontrer au moins un vaisseau avec le terme « gravité » ou équivalent pour faire plaisir à cette civilisation en « mettant plus de gravité » dans les noms de ses vaisseaux.
Chaque roman étant indépendant, voici un petit laïus pour vous expliquer, de manière très sommaire, ce qu'est la Culture au cas où vous la découvriez.
La Culture est une civilisation d'humanoïdes et d'IA très avancée (environ 9000 ans d'existence) qui se complaît à se décrire comme étant anarchiste, tolérante et hédoniste.
Dans cette civilisation hautement égalitaire, les IA sont considérées comme des personnes à part entière. Humanoïdes et IA y vivent sans manquer de rien (l'argent n'y a d'ailleurs plus court, et pour obtenir des ressources, il suffit principalement de demander - charge à vous de convaincre pour que les culturiens adhèrent au projet et viennent vous aider... ou non).
Le niveau technologique de cette civilisation permettant de s'offrir à peu près tout ce que l'on peut espérer (de la vie éternelle au vaisseau spatial), l'essentiel est de savoir comment IA et humanoïdes vont dépenser leur temps (ce qui est un thème récurrent de la saga car lorsque l'on a tout, comment fait-on pour vivre ?).
Côté extra-terrestres, de nombreuses autres espèces existent, ont existé, et vont probablement exister dans le futur.
La Culture est une civilisation dite impliquée (c'est à dire qu'elle se mêle des affaires des autres) de haut niveau technologique - quasiment ce qui se fait de mieux pour une civilisation restant dans notre univers physique. Toutefois, ce n'est pas la seule et d'autres civilisations tout autant évoluées (tant technologiquement que philosophiquement) existent. La Culture n'est donc ni seule, ni la plus « forte » (si ce terme peut vraiment convenir), ni la plus influente, ni la plus vieille, ni la plus jeune des civilisation. Elle est parmi tant d'autres.
Toutefois, la Culture a un trait de caractère assez particulier, qui est qu'elle aime fourrer son nez dans les affaires des autres sachant que l'objectif général visé est la paix, l'égalité et la justice. Et c'est ce qui permet d'avoir des histoires à raconter, puisque bien évidemment, tout ne se passe pas forcément selon les plans... voire la Culture n'est pas forcément la seule à « jouer ».
De manière générale, l'ensemble des livres tournent autour d'une petite composante de la Culture appelée Contact (i.e. le service diplomatique). Le rôle premier de cette dernière est d'entrer en contact avec des civilisations et avec les moins développée, d'essayer de s'assurer que ces dernières prennent « le bon chemin » de l'évolution... tout en limitant leur intervention. La morale des impliqués de haut niveau étant en effet de laisser les jeunes civilisations arriver là où elles le désirent (même si cela signifie guerres, massacres, etc. pour les espèces contactées). Contact est donc là pour donner des "petits coup de pouce" pour aider (c'est à dire, selon leur simulation, faire en sorte que ce chemin soit le plus court / propre possible). Parfois ça marche... parfois pas.
Parmi Contact, il existe des sous-sections dont celle qui est quasi-systématiquement associée aux livres, à savoir Circonstances Spéciales (CS pour les intimes, i.e. nos services de renseignements type NSA/CIA). CS est la partie qui s'occupent, entre autre, de régler / orienter les choses quand la diplomatie et les informations seules ne suffisent plus. Bref, ce sont ceux qui se salissent les mains... de manière plus ou moins raffinée et avec plus ou moins de retenue / remords... toujours dans le but de défendre la vision d’équité, de justice et de paix de la Culture. Il s'agit donc de la partie de la Culture qui au nom de la Morale et la Justice... vont employer des moyens que Justice et Morale - justement - réprouvent.
C'est évidemment qu'une très courte description de ce qu'est la Culture, mais ça permet de planter le paysage. Si vous voulez plus de précisions, les commentaires sont à vous.
Après ce (long) interlude, attaquons-nous à cette histoire particulière.
Impression
Dans Les enfers virtuels, plusieurs thèmes sont abordés.
Côté Culture, on va pouvoir découvrir le dispositif de défense / survie mis en place par la Culture dans le cas où une espèce belliqueuse serait amenée à détruire la Culture. On y suit donc les conséquences des guerres idiranes sur la psychologie de la Culture, et on y découvre ici un rôle qui n'était que très peu apparent de la section Contact de la Culture et de sa sous-section Circonstances Spéciales.
Le thème principal de l'histoire est la gestion des âmes puisqu'il est question ici de civilisations ayant la technologie pour sauver « l'âme » d'une personne et capables de faire tourner des réalités virtuelles dans lesquelles ces âmes peuvent être mises. Je vous laisse découvrir le traitement, que j'ai trouvé dense et intéressant, des conséquences que peuvent avoir ce genre de technologie sur les croyances religieuses, mais aussi la gestion de l'« après-vie » quand on est mort, mais pas vraiment.
On y découvre aussi 3 nouvelles sous-section de Contact, à savoir les sous-sections :
- Quietus : en charge de gérer les entités s'étant retiré d'une existence biologique vers une existence numérique et celles qui sont décédés et qui se sont vues ramener à la vie. L'ambiance change des coups fourrés de Circonstances Spéciales (CS) - puisqu'on est censé y œuvrer avec la dignité souvent associée à ceux qui travaillent avec les morts.
- Numina : en charge d'être en contact avec les entités s'étant sublimées (c'est à dire étant passée à un niveau supérieur d'existence... pour ce que ça signifie).
- Restoria : en charge de gérer et éliminer les menaces d'essaims auto-répliquant correspondant à des entités dont le seul but est de se reproduire et de détruire ce qui n'est pas eux. Il s'agit d'une des rares sections de la Culture a avoir une mission aussi simplement définie - c'est un fait à noter.
Bien entendu, CS n'est jamais loin non plus, il faut se l'avouer.
L'histoire en elle-même est dense et intéressante, pleine de rebondissement tant sur la scène philosophique, qui nous pousse à réfléchir sur la gestion de l'au-delà, que sur le plan « space-opera » clairement présent dans cet opus.
On y suivra des personnages truculents, denses et complexes, et dont les trames sauront se réunir en vue d'assembler toutes leurs histoires dans un final explosif.
Mon seul regret tient dans l'histoire d'un des personnages principaux (Lededje) dont l'histoire, pourtant particulièrement prométeuse, tombe à plat je trouve.
C'est dommage car c'est le seul faux pas que je trouve à cet opus.
Suite à cette description, vous vous douter que j'ai adoré cette histoire, qui bien qu'en ayant un rythme assez lent, arrive à combiner densité des personnages, complexité de l'univers, bonds et rebondissements de l'histoire et réflexions sur la condition humaine et ses modes de pensée dans un paquet de space-opera / cyberpunk sans même friser la hard-science.
Car même si l'univers est complexe, que les éléments présentés sont en parfaite cohérence avec l'ensemble des concepts déjà présentés dans ce cycle, Iain M. Banks a le talent de réussir à expliquer l'ensemble de manière simple et élégante.
Et pourtant, on y parle IA, virtualité, âme, vaisseaux spatiaux, armement, nanomachines... et j'en passe... le tout l'air de rien.
Vous qui avez peur de la Hard-Science et de SF par trop scientifique... venez, vous y trouverez votre compte.
Un des meilleurs tome du cycle de la Culture, malgré une histoire avançant lentement et un poil moins compliquée que celle des précédents tomes : ici même sans trouver tous les rebondissements, l'histoire générale est somme toute, assez bien visible.
En tout état de cause, un merveilleux voyage.
Par rapport aux précédents opus, on pourra y découvrir (encore !) un nouveau pan de la Culture qui n'avait été qu'effleurer dans un tome précédent du cycle.
Note
Un 19/20 pour cet opus, qui frôle la perfection (oui, oui, y en a qui sont encore meilleurs dans ce cycle). Encore un tome qui vous fera réfléchir, tout en vous révélant un nouveau pan de l'organisation de la Culture, matinée d'une histoire prenante.
Série : Cycle de la Culture
- L'Homme des jeux (lu et non chroniqué)
- L'Essence de l'art (lu et non chroniqué)
- L'Usage des armes (lu et non chroniqué)
- Une forme de guerre (lu et non chroniqué)
- Excession (lu et non chroniqué)
- Le Sens du vent (lu et non chroniqué)
- Trames (chroniqué)
- Les Enfers virtuels (chroniqué)
- La Sonate hydrogène (chroniqué)
- Inversions (lu et non chroniqué) - roman hors cycle pouvant être lu à nimporte quel moment après L'homme des jeux
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