La Terre Mourante - intégrale T01 de Jack Vance

Couverture livre - critique littéraire -  La Terre Mourante - intégrale T01 de Jack Vance

Récit

Portrait au fusain d'une planète à l'agonie, les cinq nouvelles qui composent Un monde magique nous emportent dans plusieurs centaines de milliers d'années, quand la Terre s'éteindra doucement sous les rayons écarlates de son soleil déclinant. Écrites au lendemain de la guerre, leur pessimisme ne doit pas faire oublier leur importance historique : monde imaginaire, absence de technologie, utilisation de la magie... Quinze ans avant la publication américaine du Seigneur des anneaux, Jack Vance jetait les bases de la fantasy.

Cugel l'Astucieux nous invite à suivre les aventures rocambolesques de son héros éponyme, sympathique voleur aux mille péripéties dont les stratagèmes abracadabrants finissent toujours par se retourner contre lui...


Impression

Ce livre est le regroupement de 2 livres : un monde magique d'une part et la première partie des aventures de Cugel avec Cugel l'Astucieux qui date de la fin des années 70. Et si tout se passe sur le même monde, il y a pour moi un énorme hiatus entre les 2 livres. À tel point que je n'aurai jamais rassemblé ces 2 livres au sein d'un même recueil.

La première partie concerne le livre un monde magique qui m'a clairement déçu.
Pour resituer dans le temps, on est aux débuts de la fantasy, du temps ante-diluvien d'avant le Seigneur des anneaux (c'est dire). Et pour le coup, on y pose les prémisses de ce qui sera la trame générique des histoire de Fantasy. Cela étant dit, clairement le style simple habituel à Jack Vance ne s'exprime pas bien, du fait principalement d'une série d'histoires qui se succèdent sans réellement se recouvrir. On y trouve bien des éléments pour relier chacune de ces histoires, mais c'est vraiment très pauvre, et n'incite clairement pas à y voir une construction commune... Plutôt des nouvelles s'inscrivant dans un même univers.

Par ailleurs, ces histoires sont vraiment trop simples à mon goût. Sans entrainement des unes par les autres et leur trop grande simplicité font que je n'ai vraiment pas accroché à cette partie.
Et c'est bien parce que j'avais entendu du bien des histoires de Cugel (qui n'est finalement pas dans cette partie) que j'ai continué ma lecture.

La seconde partie (Cugel l'Astucieux) est déjà beaucoup plus agréable.
On y découvre un personnage principal (Cugel, je vous le donne dans le mille), qui se prétend astucieux... et que l'on peut découvrir surtout imbu de lui-même (bien que plein de ressources).
On peut donc suivre ses pérégrinations et les malheurs qui lui arrivent (dont il est d'ailleurs souvent l'initiateur).
Une série de nouvelles qui retracent les aventures de Cugel et qui sont, elles, liées les unes aux autres, puisque chaque nouvelle nous raconte une partie du parcours de Cugel dans ses péripéties.
Les histoires restent toujours très simplettes, mais elles sont arrivées à bien m'amuser avec le décalage entre la vision que se donne Cugel l'Astucieux... Et ce qu'on peut découvrir de la réalité.
Des textes légers, sans prétention, mais qui font très agréablement passé le temps... avec une touche désuète à souhait.

Note

Un 13/20 pour ce livre.
La première partie du livre est carrément à sauter selon moi, pour directement entrer dans le vif du sujet qu'est le début de l'histoire de Cugel l'Astucieux.
Si on y trouve pas quelque chose de sensationnel, on y passe de bons moments, notamment en cherchant à deviner quelle bourde ou bêtise va encore pouvoir nous sortir cet empaffé ^^.
Un bon moment de lecture, que je prolongerai avec la suite des aventures de Cugel.
Toutefois, ce n'est clairement pas le meilleur de Jack Vance (mais ce sont à priori parmi ses premiers écrits), et je n'en conseillerai clairement pas la lecture pour qui souhaiterai découvrir ce superbe écrivain.

Série : La Terre Mourante

  1. Un monde magique (intégrale 1) (chroniqué)
  2. Cugel l'astucieux (intégrale 1) (chroniqué)
  3. Cugel saga (intégrale 2) (non lu)
  4. Rhialto le merveilleux (intégrale 2) (non lu)

Olympos - Ilium T02 de Dan Simmons

Olympos - Ilium T02 de Dan Simmons

Récit

Échappant au scénario d'Homère, Achille et Hector se sont alliés pour vaincre les dieux et assiéger leur forteresse martienne. Ils profitent de la porte ouverte dans l'espace par les Moravecs, qui leur apportent un sérieux appui. Mais la porte commence à se refermer...
Sur Terre, les Voynix, qui ont longtemps été les serviteurs des Derniers Hommes, ont soudain entrepris de se révolter. Les Derniers Hommes, élevés dans la soie, vont devoir apprendre à se battre…


Impression

Oyez, oyez !
Vous rappelez-vous de l'Iliade ? La guerre de Troie ? Cette guerre où Hélène est le tribut ?
Ma précédente critique sur Ilium, premier tome de ce diptyque ?
Et bien nous retrouvons cet univers.
On se retrouve quelques mois après la fin d'Ilium (le roman, pas la ville). Héros grecs et moravec d'un côté, dieux de l'Olympe (et d'ailleurs) de l'autre. Le tout est sur un point d'équilibre dans cette guerre contre les dieux.

Véritable suite indissociable du premier tome, ce dernier nous conte la guerre des dieux, et le rôle que jouent les différents protagonistes que nous avions rencontrés. Moravecs, humains à l'ancienne, post-humains, troyens et achéens, tous ont leur rôle à jouer pour lutter contre ces dieux.
Mais comment défier les dieux et faire autre chose que mourir avec honneur ?

Suite du précédent tome, vous y retrouverez le même style : combats épiques, humour corrosif, mélange de cultures (l'Iliade évidemment, mais aussi du Shakespeare et du Proust) dont l'auteur a su lié les différents intervenants par l'intervention des sciences (fictives ^^).

Si vous avez aimé Ilium, la lecture d'Olympos est indispensable pour connaître la fin de tout cela. Le rythme y est le même, et de nombreux mystères y sont résolus.

Ma seule déception ? La fin. Je la trouve beaucoup trop convenu, et j'ai du mal à comprendre comment les égos de certains protagonistes peuvent s'accorder avec la fin qui y est décrite. Cela dit, ce point ne concerne que les 40 dernières pages du roman... sur plus de 1000. L'honneur est plus que sauf !

Comme pour le premier tome, ce livre est un pavé : 1024 pages au compteur dans l'édition poche, où les actions et les protagonistes s’enchaînent. Toutefois, si vous êtes arrivés au bout du premier tome, vous ne les verrez pas passées (à vrai dire, encore plus vite que celles du premier tome en ce qui me concerne).
De même les références culturelles et scientifiques étant les mêmes qu'au premier tome, vous ne serez pas désorienté.

Au final, une très bonne lecture.

Attention toutefois. Si vous avez la fibre tatillonne sur le côté religion (entre juifs et musulmans), je préfère vous prévenir que l'auteur a la main lourde sur les méfaits des musulmans à l'encontre du peuple juif.
L'auteur est coutumier du fait de poser le peuple juif en victime (cf. l'échiquier du mal). Vous voilà prévenu.

Note

En définitive un 17/20 pour ce livre qui continue à mêler mythologie, science-fiction et humour avec brio. Rajoutez-y un "cour" de compréhension de la littérature de Shakespeare et Proust (mais compréhensible même par un inculte comme moi) et vous trouverez une œuvre vraiment à part.
Une note un peu moins élevée que pour le premier tome en raison de la fin à laquelle je n’accroche pas totalement, mais cela reste pour moi du très bon.

Série : Ilium

  1. Ilium (chroniqué)
  2. Olympos (chroniqué)

Ilium - Ilium T01 de Dan Simmons

Ilium - Ilium T01 de Dan Simmons

Récit

Imaginez que les dieux de l'Olympe vivent sur Mars. Ils se déplacent librement dans le temps et l'espace grâce à leurs pouvoirs quantiques. Leur plus grand plaisir, c'est la guerre de Troie qui se joue sous leurs yeux. Pour y mettre un peu plus de piment, ils envoient des érudits terriens modifier les événements à leur gré, en gardant toutefois le récit d'Homère comme référence. Mais en orbite autour de Mars, de petits observateurs surveillent les jeux divins.

Impression

Oyez, oyez !
Vous rappelez-vous de l'Iliade ? La guerre de Troie ? Cette guerre où Hélène est le tribut ?
Et bien nous y entrons de plein pied avec Ilium de Dan Simmons.
Ce récit s'articule réellement autour de 3 volets qui alternent et qui convergent :

Premier volet : la guerre de Troie

La guerre de Troie, les dieux dans l'arène, les guerriers troyens et athéniens sur-humains, pour vous ce sont que des mythes ? Et bien pas dans ce livre.
Nous voici dans le futur assez lointain. Une partie de l'humanité (les post-humains) ont évolués et avec leur science sont l'égal des dieux. Et justement leur grande occupation du moment, c'est de se prendre pour les dieux grecs et de rejouer la guerre de Troie avec comme pièces sur l'échiquier les Grecs et Troyens correspondant en tout point à ce qui est décrit dans l'Iliade.
Pour pouvoir donner du piment, les dieux ne connaissent pas l'histoire de l'Iliade mais ont leur chouchous (pour rappel certains d'entre eux sont leur enfants !). Cette guerre n'est donc pour les dieux qu'un échiquier pour passer leurs guerres intestines.
Afin de vérifier que personne ne "triche", des observateurs, anciens critiques / professeurs spécialisés dans l'étude des œuvres d'Homère, morts et ramenés à la vie par les dieux, sont là pour vérifier que la guerre de Troie suit bien le cours décrit par Homère.
Évidemment, ils n'ont pas le droit d'intervenir, juste vérifier les faits. Mais voilà, l'un d'eux, le scoliaste Hockenberry, après 9 ans de ce "travail", va vouloir intervenir.

Second volet : les moravecs

Les moravecs sont des
cyborgs envoyés par les humains dans le passé pour coloniser l'espace jovien et la ceinture d'astéroïdes.
Ces derniers ont perdus contact depuis longtemps avec les humains, se désintéressant d'eux, bien que profondément humain dans leur "âme" car construit à l'origine comme ça.
Ces moravecs partent pour une mission d'exploration / militaires après avoir repéré des activités quantiques très importantes sur Mars pouvant à terme menacer l'intégrité de l'univers et qu'ils doivent faire cesser.

Troisième volet : les humains à « l'ancienne »

Sur Terre, les humains « à l'ancienne » sont ceux qui n'ont pas suivi le mouvement des post-humains. Ils y vivent entourés de serviteurs robotiques.
Ils ne possèdent quasiment plus aucunes connaissances et passent leur temps à batifoler, se rencontrer, parler... on se croirait dans une aristocratie type victorienne à l'échelle de la planète.

Au fur et à mesure de la progression de ces 3 volets, nous découvrons petit à petit cet univers détonnant, complexe, chargé d'histoire où les éléments s'intriquent les uns dans les autres, mêlant sciences et mythologie.
L'ensemble du récit est par ailleurs habité d'un humour corrosif vulgaire et direct ou bien plus subtil. Dans tous les cas c'est particulièrement truculent. Par exemple :
J’aurais bien aimé recevoir un dollar chaque fois que j’ai entendu l’un des Achéens déclarer en râlant que si Ménélas avait été meilleur amant – « s’il avait eu une plus grosse bite », comme l’a formulé Diomède trois ans auparavant alors que je me trouvais à portée de sa voix –, alors Hélène n’aurait pas fui à Ilium avec Pâris.
J'ai vraiment adoré ce roman qui a su marier la mythologie de la guerre de Troie avec la science-fiction.
La trame du récit, même si on en voit rapidement les grandes lignes, surprend par la densité du background, la complexité des éléments et le fait que la tâche "herculéenne" semble quasiment impossible à mener à bien.
De plus l'originalité du traitement de la guerre de Troie est vraiment agréable et rafraîchissante (voire sanguinolente).
L'histoire de ce récit par contre s'arrête sur un cliff-hanger que je ne détaillerai pas faute de spoiler le récit, mais il me semble quasi-indispensable de lire le second (et dernier) volume afin de connaître la fin de cette épopée (et non pas de se l'imaginer).
Mais rassurez-vous. Je souffle un peu avec un autre livre, et m'y remet rapidement.

Quelques petites remarques toutefois. Ce qui suit ne m'a pas du tout gêné, mais peut être trouvé contraignant par certains :
  • Ce livre est un pavé : 870 pages dans l'édition poche, où les actions et les protagonistes s’enchaînent. Certains pourront trouver cela trop dense. Personnellement la mayonnaise a bien pris, et n'ai pas eu de problème pour suivre.
  • Il vaut mieux connaître un minimum l'Iliade. Je vous rassure, une connaissance très superficielle est suffisante, mais à tout le moins nécessaire pour apprécier qui est qui, et surtout à qui correspondent les dieux. À mon avis, un rapide résumé de l'Iliade est amplement suffisant.
  • La partie sciences se base sur des éléments de la mécanique quantique. Pas mal de vocabulaire y afférent est employé. Ce n'est pas de la Hard-Science, mais on en n'est pas très loin non plus. Avis à ceux que cela rebute.

Note

En définitive un 19/20 pour ce livre qui réussit avec brio à mêler mythologie, science-fiction et humour.
En plus cette lecture nous en apprend sur l'Iliade, Shakespeare, Proust, et éventuellement sur la mécanique quantique.
Une superbe plongée dans la mythologie avec une originalité sur le traitement de cette dernière.
Je conseille pour ceux que les points durs exposés ci-avant ne rebute pas et d'autant plus pour ceux qui ont su apprécier les Cantos d'Hypérion.

Nota : la critique de la suite, c'est par ici.

Série : Ilium

  1. Ilium (chroniqué)
  2. Olympos (chroniqué)