On reprend la suite du tome 1, après la destruction de l'essaim de Kel Cheris et dont manifestement, Shuos Jedao a réussi à s'extirper, se réservant le luxe de faire main basse sur un gros essaim Kel de l'Hexarcat au passage.
Cette fois-ci pas de nouvelle découverte de l'univers en tant que tel. Le premier tome constituait, notamment, une description des postulats de base du fonctionnement des différentes technologies, et ces postulats restent d'utilisation, sans grande découverte majeure à ce propos, mais conservant sa rigueur d'application rappelant la Hard-Science.
On est donc cette fois-ci en terrain connu « mathématiquement parlant », et c'est plus du côté sociologique que l'univers va apporter de nouveaux éléments à intégrer, notamment sur comment se traduit pour le peuple le régime du Haut-calendrier.
Côté histoire, la composante SF militaire reste de mise, mais elle est clairement épaulée par une composante d'intrigues. En effet, tout tourne sur pourquoi Shuos Jedao a pris en otage un essaim Kel ? Que va-t-il en faire ? Et arrivera-t-il à ses fins ?
L'histoire se compose autour de ces trois questions et permet clairement de mieux comprendre le système politique de l'Hexarcat.
Personnellement, j'ai anticipé la plupart des rebondissements - qui était somme toute assez visibles surtout quand on a bien en tête le premier tome - mais la découverte des rouages en jeu dans cette société fait facilement oublier ces facilités.
Les personnages principaux restent denses et bien écrits. Chacun ayant ses désirs et intérêts et traduisant des postures qui ne sont ni archétypales (ce qui pourrait être au regard des familles de l'Hexarcat) ni dénuées de fondements si l'on oublie notre moralité.
Et encore une fois, il y a toujours une dynamique d'évolution des personnages les uns au contact des autres qui est fort plaisante.
L'écriture reste fluide et on n'a plus l'obstacle des notions de base de l'univers à assimiler, ce qui fait que ce tome reste beaucoup plus abordable - on a payé le prix de l'accès au précédent tome.
Note
Un 16/20 pour ce livre.
Ce tome est toujours intéressant par le traitement à la fois de la SF en mode space-fantasy mathématique, mais aussi au travers des dynamiques des personnages et de la découverte des rouages internes de l'Hexarcat.
Si vous avez aimé le premier tome, ce second opus ne vous décevra pas, et il ouvre plein de perspectives possibles concernant le troisième et dernier tome.
De mon côté, vous le trouverez en SF-militaire. Pourquoi ? Tout simplement parce que la thématique principale reste la guerre, les batailles, la stratégie / tactique et les intrigues qui tournent autour. Et comme je ne m'autorise à mettre un livre que dans une seule catégorie (sinon ça serait trop le boxon), et bien voilà.
Cela étant dit, les autre classifications sont loin d'être non étayée (sauf une à mon sens). Contradictoire quand on voit la définition de ces classements ? Et bien pas tellement.
Reprenons donc :
SF-militaire : cf. supra. Le cœur du livre est un livre de SF-militaire.
Space-opéra : alors pour le coup oui, on est dans l'espace. Mais c'est à mon sens pas suffisant. Pour moi le space-opéra doit nous faire découvrir un univers, différentes planètes, etc. Pour le coup, on va rester centré sur une même zone, et ça me semble trop limité pour le raccrocher principalement à cette catégorie
Hard-SF : alors d'une certaine manière oui. L'ensemble du livre est basé sur des règles qui découlent de paradigmes établis dans le cadre du livre. La logique mise en œuvre ressemble donc à de la Hard-SF. Mais de la light-Hard-SF dans ce cas, si je puis dire. Car de facto, les règles sont peu explicitées et ne ressemblent que de loin à des principes physiques. C'est donc une structuration qui peut s'en rapprocher par certains aspects, mais on est loin de la vraie Hard-Science. Ceux qui ne peuvent sentir ce courant peuvent donc se rassurer.
Space-fantasy : alors clairement on est dedans. Les armes et équipements à singularité ressemble plus à une magie mathématique (les technomagiciens ont pris le pouvoir) qu'à de la science. Et si le cœur du récit n'était pas la guerre (physique ou psychologique), c'est sous cette dernière référence que je l'aurai classé.
En bref : méfiez-vous de la classification de ce livre, on est clairement à la croisée des chemins.
Impression
Ce livre est clairement difficile d'accès.
D'une part on est placé directement dans l'univers, sans explication d'introduction. Personnellement j'adore ce procédé qui me force à réfléchir et à faire des hypothèses sur le fonctionnement de l'univers décrit, mais ça n'en rend pas l'accès simple.
Mais ici, il faut rajouter une introduction dans un univers qui semble être de la Hard-SF, avec des lois et des mathématiques... mais qui s'appuient sur des concepts hautement non mathématique.
Finalement, c'est à la fois très intéressant comme univers, mais y a moyen de perdre facilement les lecteurs, y compris les habitués de la Hard-SF, tant ce côté Hard-SF n'est principalement qu'apparence.
Alors pour vous éviter de passer à côté, je vous propose une introduction à l'univers, rapide et non exhaustive, mais qui devrait permettre de ne pas souffrir les premiers chapitres (oui c'est cadeau).
Fonctionnement de cet univers
Dans cet univers, il y a 2 sortes de technologies :
Les technologies dites invariantes qui sont celles que vous pourrez trouver dans tout bon livre de SF. Et les technologies dites à singularité. Ces dernières, pour fonctionner, s'appuient sur l'utilisation d'un « Haut-calendrier » qui permet de produire des effets quasiment magique.
Toute la société de l'Hexarcat (et sa suprématie militaire notamment) s'appuie sur l'utilisation de ce Haut-calendrier qui, par l'utilisation de mathématiques spécifiques permet d'en tirer des effets.
Sachez que ce Haut-calendrier n'est actif que du fait de la croyance d'un peuple en ce calendrier, et que de ce fait, tout un ensemble de « rituels » sont associés pour renforcer cette croyance, et de fait, renforcer l'utilité de ce Haut-calendrier.
À titre d'exemple d'utilisation, vous trouverez l'utilisation de formation de combat des unités d'infanterie. Selon la position de chaque homme et femme de la section, des effets types bouclier / vision / etc. s'appliquent.
Je vous laisserai découvrir les multiples armes qu'ont pu ainsi inventer l'Hexarcat, mais une chose est facilement mise en évidence : l'utilisation de singularités dépasse largement l'équivalent en technologie invariante, et c'est ce qui permet à l'Hexarcat de se maintenir en place.
Maintenant, je ne sais pas si vous l'avez vu venir, mais qui dit que toute cette technologie et suprématie se base sur la croyance d'un peuple en des rituels, dit que penser autrement, c'est nuire à l'Hexarcat. Et de fait, les hérésies en viennent à modifier le Haut-calendrier, et de fait, à rendre caduque (ou pire) la technologie singulière et donc transformer l'hexapuma hexarcate en chaton (enfin pas à ce point, mais quand même).
Voilà, avec ça, vous comprendrez sans doute mieux les premiers chapitres et le pourquoi l'Hexarcat prend si au sérieux une hérésie, surtout en son sein.
Le contenu
La section précédente vous décrit le fonctionnement de la « technologie » singulière (entre guillemet, car bon, ça ne s'applique pas qu'aux objets technologiques, mais aussi à la psyché humaine ou bien aux figures que les soldats forment par exemple).
Et cette technologie donne une couche space-fantasy très sympathique à ce livre. Cette dernière est d'ailleurs exploitée intelligemment et de manière cohérente.
La gouvernance de ce monde est un régime totalitaire où 6 familles intriguent pour faire monter sa famille au détriment des autres. Chaque famille possède une fonction principale telle le combat pour les Kel, l'espionnage et la stratégie pour les Shuos, etc. Les querelles entre ces familles étant clairement le moteur de la situation et source de rebondissements liés aux contraintes politiques.
Côté scénario, on est sur du classique de SF-militaire : une insurrection qu'il faut mater et qui prend lieu dans une place forte inexpugnable. Il faut donc faire appel à un génie militaire pour tenter de sortir des ornières. Mais ce génie a un passé trouble et fort déplaisant à son actif.
Les 2 personnages principaux sont donc à l'opposé l'un de l'autre, et évidemment, quand un génie de la stratégie est aux manettes, on peut se douter que pas mal de choses ne sont pas spécifiquement anodines... Mais encore faut-il mettre le doigt dessus dans un univers passablement différent du nôtre.
Les personnages principaux sont denses, chacun avec leurs points forts et faiblesses, et le scénario joue dessus, rendant l'ensemble intéressant à lire et très intéressant à voir comment les personnages évoluent les uns au contact des autres.
L'écriture est fluide et une fois compris les notions de base de l'univers, on se laisse emporter facilement dans le récit.
Note
Un 17/20 pour ce livre. Ce tome est intéressant par le traitement que j'ai trouvé inattendue de la SF en mode space-fantasy mathématique. Ajoutez à cela de la SF-militaire qui fait la job et des personnages intéressants, on se laisse sans problème entraîner dans cet univers.
Et clairement à la fin de ce tome, je souhaite continuer la lecture de cette saga pour savoir de quoi il retourne en terme d'histoire et comment cela va se terminer.